« A ta place », un ordre fondamental.
A une époque où d’aucuns affirment que dire « non » est une violence, que le mot « maître » ( de son chien ) recèle, par essence, les germes de la maltraitrance et que le simple fait de faire porter un collier à son chien constitue la preuve irréfutable d’une relation malsaine fondée sur la peur et l’oppression de l’homme sur l’animal, je m’arrête un instant sur un commandement que ces personnes considèreraient comme le signe ultime de l’assujettissement de Médor si ma page leur était grande ouverte : Le « à ta place » .
‘A ta place »… » vas à ta place », »
ta place », « place »… un endroit dévolu à…une zone définie où il
s’agit d’aller, de rester et, sinon tout ce qui précède est vain,
d’attendre d’être autorisé à en sortir par le maître.
Voilà un
ordre qui a de quoi ulcérer plus d’un partisan du chien »
libre »…Pourtant, apprendre au chien où se trouve cette place ( en la
matérialisant par une planche de repos, un lit en toile sur pieds, un
tapis, un matelas…) et lui enseigner qu’il faut attendre d’en être
libéré pour la quitter relève d’un des premiers apprentissages et sera,
par la suite, d’une grande utilité.
« Le pauvre, vous le punissez ! » entendons-nous parfois. Pas du tout, le » à ta place » n’est pas une punition, on n’y gronde pas le chien, on ne l’y houspille pas, les gosses ne vont pas s’y installer. Le » à ta place » est une zone de calme et de repos, une zone où rien de désagréable n’arrive. Le chien peut y aller de lui-même, auquel cas, il pourra en sortir quand il le veut sauf indication contraire du maître ou il peut y être envoyé, non pas pour le sanctionner mais pour assurer sa tranquillité et celle du groupe familial auquel il appartient.
» Mais ça sert à rien, il peut bien s’installer où il veut ! Ca change quoi ? » Ca change tout !
– D’abord, la gestion de l’espace et des déplacements dans cet espace
sont des prérogatives de leader. Il s’agit donc d’un commandement, qui,
appris, bien entendu, dans le renforcement positif et les
encouragements, va permettre, à peu de frais, d’indiquer au chiot ou au
chien qu’il n’est pas en charge de cette responsabilité. Sans conflit,
le chiot / chien va constater qu’il est agréable de rejoindre ce lieu et
d’y rester. Délesté du contrôle des allers et venues des uns et des
autres, installé en périphérie de la pièce et pas entre le réfrigérateur
et la cuisinière lors de la préparation des repas, couché hors des
zones de passages, le chien pourra réellement se reposer.
– Ensuite, les messages implicites et inconscients envoyés par les humains qui acceptent d’enjamber le chien posé dans le passage voire reculent devant les manifestations d’humeur du chien à qui ils demandent, un jour pas fait comme les autres, de se pousser, placent le chien dans une position sociale trouble. Et le trouble, le doute quant au positionnement de chacun dans le groupe, sont des états insécurisants pour le chien. Qui est aux manettes ? Lui ? Les humains ? Lui laisse-t-on la responsabilité de guider le groupe d’humains ? Suivant le caractère de l’animal, son gabarit, son assurance, on peut rapidement se retrouver avec un chien qui pense qu’il est en charge du groupe, légitimement puisque les humains ont adopté devant lui, à leur corps défendant, des postures de déférence réservée ordinairement aux leaders. Indiquer au chien où se trouve » sa place » permet donc, avec une redoutable économie de moyens, de lui signifier qu’il n’est pas ce leader.
– De surcroît, le » à ta place » permet d’éviter l’écueil de l’hyper-attachement et/ou de l’appropriation du maître par le chien, seconde situation qui viendrait alimenter l’impression du chien d’être aux manettes du groupe. Sans place attitrée, le chien risque rapidement d’investir l’espace personnel de l’humain sans y être invité, autre comportement pouvant déboucher sur un renforcement de l’animal dans ce qu’il pense être « sa place ». « Non, mais c’est génial, je m’assois, il s’assoit contre moi., il m’adore », » il me suit partout, même sous la douche, quel chien fidèle ! », » je ne peux pas bouger sans qu’il soit contre moi, on est fusionnel ! »…Non, ça n’est pas » génial », ça n’est pas non plus une preuve de « fidélité ». L’apprentissage de la solitude débute dès le plus jeune âge alors que le maître est à la maison, en ne laissant pas le chiot/chien le suivre partout, lui coller aux basques et/ou bloquer ses mouvements et ses déplacements. Indiquer au chien que non, quand je cuisine tu n’es pas dans ma bulle mais « à ta place », quand je vais chercher quelque chose tu restes » à ta place »…c’est aussi lui signifier que notre espace personnel, comme nos mouvements, n’est pas soumis à sa pression. Le commandement » à ta place » va donc favoriser l’acquisition d’une autonomie du chien hors la présence du maître mais aussi renforcer l’importance du maître puisque sa proximité immédiate ne sera pas un dû mais un octroi du maître, une faveur de ce dernier.
» Oui mais nous on a trois chiens alors s’il faut envoyer tout le monde « à sa place »…on n’est pas couché ! » …eh bien si, justement. Avoir appris à chaque chien à aller et rester à sa place c’est se doter d’un outil puissant de gestion du groupe. Quand l’excitation monte, quand il y a de la tension dans l’air, le » à ta place » va canaliser chaque chien dans un ordre connu synonyme de redescente de l’énergie, d’apaissement. La position couchée favorise un retour au calme, le maître étant décisionnaire, le chien s’en remet à lui pour la suite des évènements.
Enfin, arrivant en un lieu que le chien ne connait pas mais où il n’a pas le loisir d’aller fureter ou d’être accompagné pour découvrir l’endroit ( restaurant…), la pratique de cet ordre permettra immédiatement d’indiquer au chien l’endroit où il doit rester. Un simple tapis de sol de voiture pourra matérialiser la zone où le chien a le droit de s’installer ( » voilà » à ta place », » à ta place » en tapotant le tapis de la paume de la main) et lui fournir une place rassurante et cadrante.
Voilà pourquoi ce commandement simple à faire apprendre est un précieux sésame pour une vie sereine avec votre compagnon.